DEFI 83 : CROQUEURS DE MOTS
Dans un grand moment de "ras-la-casquette", vous voilà parti(e) seul(e) en vacances, en Corse. Au volant de votre petite voiture, après vous être attardé(e) un peu sur le port de
Bonifacio, Vous regagnez votre hôtel à Ajaccio, zigzaguant dans la montagne. Le ciel s'assombrit, la nuit tombe, Mais il y a aussi l'orage qui
gronde, et soudain!............. panne de voiture! Seul(e) au milieu de nulle part, sous la pluie désormais. Vous vous demandez
ce qui vous a pris de partir ainsi tout(e) seul(e) et....
Une grande peur
Je pris ma veste et mes clefs de voiture et sans me retourner claquai
la porte.
Je ne voulais plus entendre le monde ni les voisins qui m’indisposent.
Je ne voulais plus parler encore et encore de rien et de tout avec mes collègues, je ne voulais plus
vivre avec Julien, j’en avais marre, marre…
Quelle belle idée de
partir enfin seule vers un horizon que je connaissais bien :
La Corse du Sud.
Je décidais de visiter le port de Bonifacio où mes parents venaient tous les ans.
Puis, ayant pris une chambre à Ajaccio, l’heure passant, je décidais de remonter. Je m’engageais sur la nationale 196 quand un coup de tonnerre très fort me fit sursauter
et prendre peur. J’allais donc m’arrêter dans un coin et attendre qu’il passe. Cela me paraissait le plus raisonnable. Je pris donc la départementale 69 et à la bifurcation m’arrêtais, avant de me retrouver à Sainte Lucie de Tallano que je ne connaissais pas.
Des trombes d’eau ruisselaient maintenant sur mon pare-brise et je m’aperçus qu’en fait je m’étais
complètement fourvoyée et étais perdue dans la montagne. Je voulus faire demi-tour mais le moteur cala, et je dus me rendre à l’évidence, après
plusieurs essais rageurs et infructueux, j’étais en panne.
Je restais calme … jusqu’à ce que …
J’allumai les phares
pour avoir un aperçu de l’endroit où je me trouvais.
J’aperçus au milieu de la route, une forme énorme qui avançait vers ma voiture. Là je pris peur : un animal sans doute ? Je changeais d’avis quand des coups violents dans ma vitre
arrière m’obligèrent à me rendre à l’évidence. Une chose sans définition me regardait et ses yeux sans
couleur me fixaient. Je devais rêver, j’allais me réveiller.
Hélas, la voiture commença à tanguer et des grognements étouffés se
mêlaient aux coups de tonnerre incessants. Partout des éclairs me montraient cette terrible apparition qui commençait maintenant à frapper
dans ma vitre arrière. Que faire ? Ah oui ! Mon portable, suis-je sotte ! Je cherchais fébrilement dans la boîte à gants puis dans mon sac, rien pas de portable. Sous mon
siège peut-être ? Ah ! Le voilà. Je fis fébrilement le numéro de mon hôtel mais « pas de réseau » s’afficha.
Un coup de tonnerre plus violent ou alors était-ce ce monstre qui
avait réussi à casser ma vitre ? Toujours est-il que je reçus un grand coup sur la tête et je m’évanouis.
Il parait que le lendemain matin à l’hôpital d’Ajaccio, j’étais devenu
la femme qui avait vu un monstre entre Bonifacio et Ajaccio. Je les entendais rire. J’étais incapable de gérer. Ma tête était enveloppée d’un énorme pansement et on ne voyait que mes yeux
et mes lèvres.
— On peut dire que vous
revenez de loin, la parisienne ! Si le père Ferrari et son âne ne vous avaient pas
aperçue pendant l’orage, vous seriez morte à cette heure. Vous avez refusé de lui ouvrir la portière alors ce qui devait arriver arriva, l’arbre sous lequel
vous vous étiez garée, foudroyé par la foudre, est tombé
sur votre toit de voiture qui s’est écrasé sur votre tête.
Je n’étais pas très fière de mon attitude, et m’en voulais un peu,
quand un infirmier vint me prévenir qu’un homme et son âne m’attendaient à la sortie pour me ramener à mon hôtel. Je revois les yeux fixes de cet homme et surtout cette couleur indéfinissable.
En fait il était aveugle, et c’est son âne qui l’avait fait s’arrêter devant ma voiture.
Je ne verrai plus jamais
les Corses de la même manière.
Je sais maintenant qu’il y a toujours un ange gardien qui protège les
parisiennes qui s’aventurent les nuits d’orage sur les routes de montagne.
Devant un bon café bien chaud, le vieil homme me raconta sa vie. J’eus
soudain l’impression que ma petite crise de
déprime n’était que « pipi d’oiseau » à côté de ce qu’avait vécu cet homme. J’eus honte de
m’être laissée aller et demain promis je retourne à Paris
vers les miens.